La série True Blood d’Alan Ball (le scénariste d’American Beauty et de la magnifique série Six Feet Under) vient juste de clôturer sa saison 5 (aux États Unis, alors qu’en France nous devrions être à la saison 3, sans commentaires). Je viens donc de finir cette saison 5 au rythme de trois ou quatre épisodes par soirée (donc je suis à fond dedans;-) et je peux vous dire que cette série (et particulièrement cette saison) est absolument incroyable et totalement transgressive. Elle mélange joyeusement nos amis les vampires, les fées, loup garous, métamorphes, sorciers, intégristes religieux, homosexualité, homophobie, gore, humour, minorité sexuelle, racisme (les racistes humains dans cette saison portent des masque à l’effigie d’Obama), drogue, inceste, violence, décapitation d’enfant (je vous assure!), politique, sexualité, fantaisie… le tout dans une petite ville (presque) tranquille de Louisiane. Je vous conseille cette série, mais attention ce n’est vraiment pas Twilight 😉 Petit détail amusant, dans cette série tout est permis sauf visiblement fumer (par contre se droguer, aucun problème).
Cette série joue constamment sur les métaphores, la transgression et le second degré. On aura bien compris les rapports entre droits des vampires et droits des homosexuels, mais là ou cela devient passionnant c’est le traitement des seconds plans et des seconds rôles dans cette série.
En effet les seconds rôles sont particulièrement développés dans True Blood. Les deux personnages principaux sont volontairement inintéressants (Sookie et Bill le vampire, drôle de nom pour un vampire!) alors que les seconds rôles sont particulièrement fouillés et attachants. Comment être insensible à Jessica, Tara, Pamela… sans oublier les personnages masculins comme l’immense Lafayette, Alcide, Eric, Russel, Jason, Sam… La psychologie (ainsi que la sexualité) des personnages changent sans cesse, à chaque épisode un de personnages prend la vedette, pour plus ou moins disparaitre dans les épisodes suivants, puis pour ensuite revenir toujours plus intéressant (par exemple Tara).
Voici une photo illustrant parfaitement le rapport entre premier rôle (Sookie, comme toujours un peu perdue) et un second rôle (Alcide, constamment torse nu, on se demande pourquoi 😉 ) dans la mise en scène.
Il y a toujours des lectures multiples, jouant sur le second degré (voir troisième). En plus des seconds rôles, il y a l’utilisation de l’arrière-plan qui joue un grand rôle dans la réalisation. Lors de chaque scène importante, il y a des détails en arrière-plan toujours incroyables (des détails plus ou moins morbides, drôles, gore… suivant les situations). Je pense que l’on pourrait même faire une relecture de cette série uniquement par l’usage des arrières-plans. Par exemple, l’ami homosexuel de Lafayette se nomme Jesus (écoutez ce que dit la mère de Lafayette concernant Jésus!), durant les scènes de morsures en groupe, observez où certains vampires mordent, les personnages supposés hétérosexuels (ce qui est assez rare dans cette série) sont souvent filmés comme des icônes gays (musclé, torse nu épilé…).
On sent vraiment que l’auteur s’amuse avec ses personnages et ses intrigues totalement décalées. Les personnages ne sont que des pions que l’on pose, et on lance des dés afin de déterminer leurs relations entre eux.
La musique de fin des épisodes est toujours différente et surtout toujours signifiante par rapport à l’épisode que l’on vient de regarder. Il faut aussi remarquer la phrase finale de chaque épisode qui sont toujours très biens, par exemple le fameux « Peace is for Pussies!» de Russell, ou alors le « Run! » de la fin de cette saison 5.
Les cinq premières minutes du premier épisode (de la saison une) sont une vraie leçon de cinéma, on comprends tout de la situation et de l’univers de la série avant même que le générique d’introduction arrive.
Il faut donc aussi parler du très beau générique d’introduction (avec beaucoup d’images subliminales), qui ne montre jamais de vampires, ni d’images de la série, mais au contraire des images d’archives réalistes (sexe, religion, ségrégation raciale, alcoolisme…), comme pour nous dire, je vais vous montrer des choses fantastiques dans cette série, mais en fait je parle de la réalité.
Et pour finir une citation et un extrait avec le grand Russel (une sorte de Lux Interior des Cramps) :
« Je vous aide à prendre une décision les humains. Laissez tourner les caméras ! Savez-vous à quelle vitesse je peux tuer ? Mesdames et messieurs je m’appelle Russell Eddington, et je suis un vampire depuis environ trois millénaires. Aujourd’hui la ligue américaine pour le droit des vampires c’est mise en tête de vous faire avalez que nous étions comme vous et j’imagine que d’une certaine façon c’est bien le cas, nous sommes tous narcissique comme vous, notre seul but est d’obtenir ce que l’on convoite quel qu’en soit le prix. Sur ce point-là nous sommes égaux, réchauffement climatique, guerre sans fin, déchets toxiques, enfants esclaves, torture, génocide, c’est très peu cher payé comparé au confort que nous apporte nos 4×4, nos écrans plasmas, nos diamants, nos jeans fashions nos stupides et hideux pavillons de banlieue. Tout cela ce n’est que des futiles symboles pour apaiser nos peurs profondes d’invertébrés sans âmes. À part ça nous n’avons rien à voir avec vous rien du tout. Non nous autres nous… ha ha ha… nous sommes immortels parce qu’on boit du true blood vous croyez ? Non, parce qu’on boit du vrai sang, du sang humain. Voilà la vérité que la ligue essaye de vous dissimuler. Parce qu’il faut regarder la réalité en face, c’est très peu vendeur d’avouer que vous servez de garde-manger. Alors ils font bonne figure pour vous faire gober leurs amendements. Mais ne vous faites pas avoir c’est moi le vrai visage des vampires. Pourquoi chercherions-nous à être vos égaux ? Pourquoi ? Vous êtes loin d’être nos égaux. On va vous saigner on va se nourrir de vos enfants… Maintenant place à la météo. Tiffany. »
et la scène en vidéo :
Bonjour,
Je trouve que le scénario des 5 saisons est très proche de l’univers du Monde des Ténèbres (jeux de rôle Vampire la mascarade, Loup Garou, …). A chaque saison ça monte en puissance et l’on découvre la géopolitique des vampires.
Bon après … on peut aussi dire: “c’est du Buffy 16+”. Ce qui montre le décalage des séries entre 2 générations.
Hello, tout a fait d’accord pour Monde des Ténèbres mais par contre je ne pense pas que Buffy soit aussi transgressif et sujet à une double lecture que True Blood.
Avis totalement partagé.
Même si ce n’est pas du même acabit que “Six Feet Under” du même Alan Ball.
Par contre il faut absolument voir son dernier long métrage, totalement boycotté, intitulé en France “Tabou(s)”, aux USA “Towelhead” !
http://www.drame.org/blog/index.php?2008/12/30/1192-true-blood-towelhead-alan-ball
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